J’ai même du aller au cinéma pour voir ce film, et surtout
trouver un lien avec ce séjour cascades de glace en Norvège. Pour être franc,
je n’ai rien trouvé. A part le côté légèrement sadomaso de l’activité glace. Le
plaisir que l’on prend à se faire un peu mal partout, grimper des structures
que le bon sens ou la logique nous déconseillerait…
Léger comme lien.
50 nuances de glace car c’est aussi le charme de l’activité.
Le support est vivant et la structure
évolutive. En fonction des températures et des conditions de formation on peut
trouver différentes glaces sur une longueur. Alors sur toute une cascade ou
tout un séjour, on y arrive aux 50 nuances…
C’est toujours compliqué à organiser un « ice climbing
trip ». Pour un roc trip, au pire le rocher est mouillé ou pas exactement
de la qualité souhaitée ; mais ça reste du rocher. Pour un ski trip, au
pire la neige n’est pas de la poudreuse de cinéma ; mais ça reste de la
neige. Pour un ice trip, si il n’y a pas de glace… difficile de l’inventer. Et
elle met un peu de temps à pousser (vers le bas) la glace.
D’ou la nécessité de planifier des destinations glace
toujours en condition. Valeur sure la Norvège ? Demandons à Jeff Mercier et
Julien Irilli qui se sont tapés un aller-retour Chamonix /Laerdal/Chamonix en 3
jours !
Première nuance de glace : Conscience et intentionnalité.
Le premier jour du voyage est consacré au repérage. Voiture,
jumelles, appareils photos… Nous sillonnons les vallées autour de Laerdal à la
recherche des lignes qui sont grimpables et nous motivent. Les monstres de
glace de Gudvangen ne sont pas encore formés mais la Vallée de Rasdalen, juste
au dessus du petit village de Mo à 20 minutes de notre Bungalow Base Camp de
Laerdal, offre de belles lignes.
Deuxième nuance de glace : Cassante et fragile.
Kjorlifossen, située au bout de cette vallée de Mo sera une
reprise parfaite. Les cotations proposées ne paraissent pas extrêmes (III
– 400m – 5+). Je grimpe avec Seb Ratel, qui peut être considéré comme une sorte
de Christian Grey. Nous jouons avec des glaçons. Attention pas comme dans le
film hein ! Nos accessoires à nous sont des piolets, des crampons et des
broches à glace ;)
La glace est très cassante et assez sèche mais le mur
terminal est fantastique à grimper.
La ligne est superbe et nous avons le sourire. Quelle belle
journée en montagne. Quelle chance d’être ici. Sur le retour nous repérons
« Thorfossen » et « Fokus » . Deux king lines qui nous
motivent pour la suite.
Troisième nuance de glace : Cinéma dans Thorfossen.
Vous savez cette glace légèrement sorbet, ou tu peux grimper
vite et en sécurité. Tu as l’impression d’être Steph Husson ou même Guy
Lacelle… C’est d’ailleurs lui qui ouvre cette magnifique ligne en 2002.
Préférant contourner la longueur clef, pas formée, par une vire facile et
logique. En 2005, Jasper force en M8, à renfort de spits pour atteindre la
draperie. En 2006, le tube mythique touche et est grimpé entièrement en glace
(6) donnant raison à Guy Lacelle. Il faut parfois savoir attendre.
Cette magnifique cascade ressemble presque à une grande voie
en montagne. 2 parties verticales séparées par une pente de neige, plus facile
mais assez dangereuse au niveau avalanches. Les cotations annoncées donnent
bien envie : (IV-500m-6), mais c’est surtout la vue du mur terminal qui
donne carrément envie. Je réussis à jeter par dessus bord le Toucan de Dim
Munoz à la deuxième longueur… Bon on continue avec un seul Toucan et on assure
le second avec une microtraction sur chaque brin… pas sûr que ce soit approuvé
par l’ensa ;)
Cette année le tube n’est pas grimpable non plus et nous
suivons l’itinéraire de Guy Lacelle. Le mur terminal est encore plus beau de
près. Nous prenons un plaisir fou à remonter ces longueurs sculptées à souhait.
La grimpe est plus impressionnante que vraiment difficile, mais nous sommes
content d’arriver en haut. 500m de glace c’est long ! Les rappels nous
déposent au pied de la cascade. Nous rallumons les frontales à l’endroit même
ou nous les avions éteinte ce matin, et nous nous laissons glisser dans ce
canyon de blocs recouverts de neige jusqu'à la route. Une journée parfaite en
montagne.
Quatrième nuance de glace : trempés jusqu’au slip.
Il faut bien rendre à Dim ce qui lui appartient et c’est
avec Lionel et lui que je fais cordée pour cette journée à Gudvangen. Les
monstres de glace qui nous faisait envie (Fosslimonster et Into the wild) ne
sont ni formés ni grimpables. Le thermomètre de la Skoda de loc affiche :
+1°C. Nous nous dirigeons vers une petite ligne repérée lors de la première
journée. Située précisément au dessus du hameau de Stalheimsoyni, juste après
l’intersection pour Jordalsnuten quand on arrive de Gudvangen. Cette ligne dans
les bois ressemble plus à un canyon avec des ressauts verticaux. Ca m’a valu
les moqueries de nono le lapin crétin, qui n’est pas intéressé par la glace si
c’est plus facile que du grade 6. Snob ;) Mais elle me motivait bien cette
petite ligne. Je suis sur que c’est une ouverture. Pas de traces sur internet,
ni auprès des grimpeurs locaux, pas de traces dans la cascade. Lionel et Dim me
laissent grimper en tête et je me mouille jusqu’au slip. Ca pisse vachement et
il faut grimper dans les éclaboussures sur le côté. Ce n’est jamais extrême
mais super sympa à grimper. Nous passons une super journée à remonter ces 7
longueurs. Nous baptiserons la cascade « Pepofossen » et proposons
les cotations suivantes : (II-350m – 5- M3). Un piton et une cordelette
rouge marquent le début de la voie, en hommage au pépé !
Cinquième nuance de glace : La cascade en short.
C’était l’équipement le plus adapté pour ce dernier jour au
canyon de Gol. Ce maudit thermomètre (fil rouge du voyage) annonce +5°C au
parking. Nous jouons un peu sur des beaux piliers de glace. L’eau qui s’écoule
à travers les broches à glace n’est surement pas un indicateur de solidité de l’édifice.
Direction les voies de dry, protégés par des spits sur du bon rocher et qui
sortent dans des draperies. Nous
repoussons les limites de grimpe sur plaquage de quelques cm, bien assurés…en
moulinette ;) C’est notre dernier jour de grimpe en Norvège et c’est super
sympa d’être toute l’équipe au même endroit.
Mais attends, ça fait seulement 5 nuances… on est bien loin
des 50… Et c’est la qu’on trouve le lien avec le titre et le film. Une fois
terminé, on en veut un peu plus. On attend la suite, car il en reste des
nuances à grimper et des projets pour toute une vie de glaciériste…
A suivre.
Tonio