Le ski de pente raide est une facette de l’Alpinisme. Que l’on parle de ski de couloirs, ski extrême ou encore freeride, le jeu est le même : Descendre à ski par un itinéraire raide et engagé où la chute est à éviter fortement. Une bonne technique du ski, une connaissance de la nivologie et un peu d’engagement mental sont des qualités bien nécessaires pour cette discipline. Comme en escalade et alpinisme, les itinéraires de ski ont des cotations de difficulté qui dépendent de la longueur, le degré de pente, l’exposition… Dans le massif du Mont-Blanc, il existe de nombreux itinéraires de pentes raides, tous plus mythiques les uns que les autres. Mais en ce début d’hiver les conditions ne sont pas vraiment au rendez-vous.
Certes un poil à la mode cette année mais tellement uniques, les dolomites nous attirent … Nous rêvons de plonger nos spatules dans ces couloirs mythiques et tellement esthétiques… Cette région d’Italie peut certainement être considéré comme la Mecque du ski de couloir. De part la morphologie et l’accessibilité en remontées mécaniques aux itinéraires les plus fous.
Pour un bon ski trip il faut déjà une bonne équipe. En plus de ma petite personne, notre équipe est composée de Ena Vrbek (Secouriste en montagne); ce bon vieux Thomas Gautheron (ingénieur risques naturels et partenaire des premières virées en pente raide) et 2 collègues de travail du GMHM (néanmoins amis) : Sébastien Moatti (fraichement diplomé du BE Ski Alpin) et Arnaud Bayol (monsieur 100000 volts).
Départ le 24 février au matin de l’EMHM. Première mauvaise nouvelle : Arnaud s’est vrillé le dos et doit rester bloqué à Chamonix. Extrêmement motivé par le projet, il est bien sûr déçu, mais il ne peut même pas rester assis dans la voiture ! Le voyage se fera sans lui et c’est dommage. Il a deux qualité qui font de lui le parfait partenaire de virées variées : il est aussi bête que sympa et malgré la frustration de n’avoir pas pu jouer avec nous, il réalise le petit montage que voici, merci à lui ;)
Et le lien Youtube :
https://www.youtube.com/watch?v=tdijhryoZ14
Il nous faut 8h de trajet pour rejoindre Cortina d’Ampezzo. Arrivés sur place nous sommes affolés par les quantité de neige. Des murs de neige de 2m de haut encadrent la route. Des traces d’énormes avalanches sont visibles un peu partout…ambiance. Il y a tellement de neige que certaines remontées mécaniques sont littéralement enterrées et donc inutilisables. Ceci complique un peu les plans mais nous promet des couloirs bien remplis.
Mardi 25 février, premier jour de ski. Nous partons pour le secteur de Sella qui concentre la majorité des couloirs mythiques du coin. Le vrai objectif de ce ski-trip est la descente à ski du couloir Holzer. Les collègues du groupe, ayant skié cet itinéraire en 2006 en préparation de la Nouvelle-Zélande, nous ont bien mis l’eau à la bouche. « Imaginez un couloir orienté nord, très étroit entre le magnifique rocher des dolos, 600m de long à 45° en moyenne avec un crux à 50° et un petit rappel au milieu. Le tout avec une approche de 5 minutes ». En effet, une fois en haut du téléphérique de Sass Pordoï, il suffit de se laisser glisser une centaine de mètres, bifurquer à gauche et vous voilà au sommet de l’itinéraire ! Le premier téléphérique part à 9H00, nous sommes dedans, prêt pour une belle journée ensoleillée. Nous avions prévus de nous échauffer dans un autre itinéraire, moins soutenu, le couloir Joël qui s’accède depuis le même téléphérique. Le problème est que ce couloir est orienté Sud et qu’il a fait grand beau et assez chaud les 2 derniers jours. A 9h du matin, le couloir est rempli de traces regelées, inskiable ! Il faut attendre que le couloir décaille. Dans la benne nous rencontrons l’auteur du Topo à skis des dolos. Un guide de montagne super sympa. Il nous informe que le Holzer est en super condition, tellement enneigé qu’il passe intégralement à skis, sans rappel. Quel Luxe.
La décision est donc prise d’aller « s’échauffer » dans le projet de la semaine : le couloir Holzer ! Les premiers virages nous mettent en confiance. L’itinéraire est effectivement en super condition. Une neige soufflée dure, accrocheuse, avec un peu de poudreuse par endroits. Un régal. Après quelques précautions, nous nous lâchons et réglons ce couloir en grandes courbes. Un pur plaisir. Après le couloir nous skions le bas du vallon pour rejoindre télécabines et télésièges qui nous ramènent au Saas Pordoï. Superbe entrée en matière.
Il est 11h lorsque nous sommes de nouveau au sommet du téléphérique (2950m) et décidons de rendre visite au couloir Joël. Cette fois il y a un peu plus d’approche : 10 minutes avec une petite montée à pied ;) L’itinéraire est long de 650 m avec une section à 45° et une pente moyenne à 40° (cotation : 4.1). La neige est encore un peu dure. Les conditions de ski ne sont pas exceptionnelles comme dans le Holzer mais l’ambiance est vraiment à couper le souffle. Un passage étroit et esthétique entre les rochers et une grande combe facile nous ramène au Saas Pordoï avec le sourire.
Pour la troisième mi-temps nous décidons d’effectuer toute la traversée du massif de Sella en passant par le Val Setus. Il faut cette fois mettre les peaux pour environ 200m de dénivelé. L’itinéraire n’est jamais trop raide, assez complexe au niveau de l’orientation et vraiment grandiose. Des combes ouvertes, des petits couloirs étroits…1050 m D-, une pente maxi de 40°, un itinéraire côté 3.3 et nous voilà complétement de l’autre versant de la montagne, à Corvara. Il est maintenant 15h30 et les remontées ferment à 17h. Il ne faut pas trainer si nous voulons regagner le Saas Pordoï. Une longue traversée (appellée « Sellaronda ») par les remontées mécaniques de Val Gardena puis Passo Sella nous ramène à destination. Nous embarquons sur le dernier télésiège à 16h59 et nous sommes aux voitures à 17h15. Quelle belle journée !
Mercredi 25 février, les jambes sont un peu lourdes et la météo maussade. Nous décidons de partir skier sur le versant nord de la mythique paroi de la Marmolada (le plus haut sommet des dolomites). Seb décide de prendre le snowboard pour changer de glisse… joueur. Depuis Malga Ciapela (1446m), nous prenons 3 téléphériques pour rejoindre le sommet de la Punta Rocca (3270m). Nous effectuons un long run d’échauffement hors piste, d’abord sur le glacier de la marmolada puis par un long vallon sympa et skiable. Après une 2e montée en benne nous partons sur le projet repéré la veille : le canyon de la Marmolada. Un itinéraire certes pas très long mais hyper esthétique et tellement typique des dolomites. Il nous faut installer un rappel pour descendre planches au pied dans le Canyon. Une fois en bas de l’itinéraire, nous avons la confirmation que le télésiège de retour est bien HS car complétement enseveli sous la neige. Il nous faut traverser le long plat du lac de Fedaia à pied. Enfin à pied pour Seb et son snowboard et à ski de rando pour les autres ;) Un troisième run depuis le sommet par une autre combe nord, restée en super neige, et nous voilà aux voitures. 5500m D- en poudreuse pour une journée de transition avec une météo moyenne, ce n’est pas si mal !
Le troisième jour nous rejoignons la station de Arabba puis, par les remontées mécaniques, le Passo Padon (2370m). Nous mettons les peaux pour rejoindre le sommet de la Cima Padon (2520m). La veille nous avons repérés, sur la carte et le topo, un couloir nord dans cette face. Il est côté 4.3 avec un passage à 50° et une pente soutenue à 40°. Du sommet nous distinguons seulement 2 traces et une belle poudreuse qui nous tend les bras. Miam miam. Le couloir est vite avalé et au pied de la face (2100m), nous remettons les peaux pour rejoindre le télésiège Monti Alti di Ornella (2187m) qui nous remonte au Passo Padon. Pour le 2 eme run nous choisissons un couloir toujours dans la Cima Padon, un peu moins raide mais toujours en neige excellente. Cette fois nous descendons tout l’itinéraire jusqu’au Village d’Ornella (1400m). Une manipulation de voiture (ou de taxi) et nous revoilà à la station d’Arabba.
Il nous faut déjà rentrer à Chamonix, avec des courbatures dans les jambes, un grand sourire et des projets pleins la tête. Il nous reste tellement de secteurs à découvrir, de couloirs à explorer dans ces magiques dolomites que nous reviendrons… l’an prochain.
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